De Dusseldorf à Vancouver au Guggenheim de Bilbao

L’exposition d’art contemporain « le miroir inversé », qui se tient au troisième étage du Musée Guggenheim de Bilbao jusqu’au 2 septembre 2012 consacre trois salles à la photographie. La première d’entre elles trace un intéressant parallèle entre deux courants essentiels de la photographie prenant l’espace pour objet  : l’école de Düsseldorf et celle de Vancouver. J’en propose ici un compte rendu très partiel, marqué par un coup de foudre pour une image contemplée en pieds pour la première fois…

L’exposition s’ouvre sur « A hunting scene » de Jeff Wall (1994), sans doute l’image la plus marquante de cette salle, imposant cibachrome sur caisson lumineux de 2m50 par 1m50. Elle donne à lire la violence sourde de la société nord américaine, en créant l’une de ces micro narrations dont l’artiste est coutumier, mêlant les codes du cinéma et de la peinture.

L’action, tendue par la détermination brutale des personnages, se situe en banlieue, dans un de ces « non lieux » photographiques (D. BAQUÉ), qui devient du coup le sujet principal de ce récit suspendu. C’est précisément tout l’intérêt de cette image que de faire de la frange urbaine représentée en arrière plan un troisième personnage à part entière, celui vers lequel converge toute la tension narrative.

Cette image illustre à elle seule ce qui singularise peut-être ces deux écoles : le statut que l’espace y tient comme sujet à part entière et non comme simple décor. Si l’on y regarde de plus près, il n’y a pas de hiérarchie entre les personnages de l’image et l’espace qui les entoure. Le lieu photographié ici prend part au récit suggéré par l’auteur au même titre que les personnages. Certes, son statut reste vague : lieu abandonné, friche promise à une prochaine urbanisation, front temporaire d’une ville ? Mais il est saturé de signifiants : débris dénotant l’abandon et la déqualification, trottoirs et transformateurs électriques rutilants qui promettent l’urbanisation à venir, terre au rebut témoignant de chantiers passés, ombre gigantesque du personnage de gauche trahissant l’heure vespérale, traces d’huile sur le bitume figeant on ne sait quelle agonie automobile…

La quantité d’informations et de pistes narratives disposées dans cette scène relève de la prouesse (elle culmine dans les dernières oeuvres de Wall, voir « In front of a night club » par exemple). D’autant que ces informations sont concentrées dans un minuscule tiers inférieur de l’image, le reste étant consacré à un ciel cotonneux (et cinématographique en diable) qui joue comme un contrepoint à la dramatisation sourde qui règne en dessous.

Le reste de la salle rassemble des oeuvres de Thomas Ruff (série « Houses »), Andreas Gursky, Rodney Graham (série « Camera obscura »), Jean-Marc Bustamante (« Cypress series »), Thomas Struth et Xavier Ribas.

gb

http://www.guggenheim-bilbao.es/secciones/programacion_artistica/nombre_exposicion_claves.php?idioma=fr&id_exposicion=146

 

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